Coté NAC: Neurologie

PRÉSENTATION DU CAS

Par le Dr ZOLLER, Résident du Collège Européen de Médecine Zoologique Vétérinaire (ECZM)

Une perruche ondulée (Melopsittacus undulatus) de sexe femelle est présentée pour changement de couleur de la cire du bec remarqué 3 semaines auparavant, amaigrissement évoluant depuis deux semaines sans altération de l’appétit et troubles de l’équilibre depuis 2 jours. Aucun traitement n’a été mis en place. La perruche vit en compagnie de deux autres oiseaux en bon état général, dans des conditions de vie adéquates pour l’espèce. A l’examen physique, la perruche est vive, réactive et présente une note d’état corporel évaluée à 2/5. La cire du bec est bleue (Fig. 1A). La cavité cœlomique est modérément distendue et l’examen neurologique révèle une monoparésie pelvienne gauche. Une radiographie dorsoventrale vigile est réalisée (Fig. 1B).

 

Fig. 1 – (A – Gauche) Photographie d’une perruche ondulée femelle, présentant un changement de couleur de la cire du bec. (B – Droite) Radiographie cœlomique vigile érigée d’une perruche ondulée présentant une parésie unilatérale gauche.

Comment réalisez-vous l’examen neurologique lors de monoparésie pelvienne chez les oiseaux ?

Une parésie est définie comme une perte partielle des capacités motrices associée à une atteinte neuromusculaire. Chez les oiseaux, les parésies pelviennes se manifestent souvent par une diminution de la force de préhension. L’objectif de l’examen nerveux en cas de monoparésie pelvienne est de distinguer :

  1. Une atteinte de type motoneurone central (MNC) ipsilatérale, indiquant une lésion du segment spinal situé caudalement au plexus brachial et cranialement au plexus lombosacré et dont la localisation vertébrale précise varie en fonction des espèces d’oiseaux
  2. Une atteinte de type motoneurone périphérique (MNP), qui indique une lésion impliquant le plexus lombo-sacré, les nerfs innervant le membre affecté ou les muscles de ce dernier.

Pour ce faire, une attention particulière sera portée à l’évaluation des réactions posturales (en particulier le placer tactile), des réflexes médullaires (en particulier le réflexe de retrait du membre pelvien, qui évalue l’intégrité du segment sacré du plexus lombosacré) et de la nociception. (Tableau 1) Les placers proprioceptifs, les réflexes myotatiques (notamment les réflexes patellaire et gastrocnémien qui évaluent le segment lombaire du plexus lombosacré), et l’évaluation de la sensibilité superficielle sont difficiles à réaliser et à interpréter chez les oiseaux.1

examen nerveux conclut à une monoparésie du membre pelvien

Dans notre cas, l’examen nerveux conclut à une monoparésie du membre pelvien de type motoneurone périphérique.

Quel est votre diagnostic différentiel lors de monoparésie pelvienne chez un oiseau ?

Chez les oiseaux, une monoparésie pelvienne peut être observée en cas de maladies néoplasiques (tumeur ovarienne, testiculaire ou rénale comprimant le nerf ischiatique, tumeur spinale compressive ou intramédullaire ipsilatérale), infectieuses (granulome aspergillaire ou mycobactérien spinal ipsilatéral, bornavirose, maladie de Marek chez les poules, néphrite bactérienne ou parasitaire associée à une compression du nerf ischiatique), toxiques (intoxication aux métaux lourds), ou traumatiques (syndrome de l’obturateur secondaire à une compression du nerf obturateur interne par un œuf lors de dystocie ou de rétention d’œuf).3

Nota bene : Ces causes nerveuses de parésie doivent être différenciées d’une boiterie orthopédique, dont les causes peuvent être  tégumentaires (pododermatite, syndrome de nécrose du pied de l’amazone), articulaires (arthrite infectieuse, goutte, arthrose, dyschondroplasie, splay leg), tendineuses (luxation, pérose associée à une carence en manganèse, déchirure tendineuse), musculaires (thromboembolisme, syndrome de claudication intermittente secondaire à un processus athérosclérotique, anémie associée à une carence en fer) ou squelettiques (ostéomyélite bactérienne ou fongique, tumeur osseuse, fracture, rachitisme associé à hypovitaminose D ou déséquilibre phospho-calcique)

A la lueur des informations anamnestiques, cliniques et paracliniques, quelle est votre hypothèse principale ? Quel(s) examen(s) complémentaire(s) proposeriez-vous ?

La distension cœlomique, la compression des sacs aériens abdominaux sur les radiographies et l’examen neurologique concluant à une monoparésie de type MNP invite à prioriser l’exploration d’un effet de masse cœlomique pour expliquer les signes cliniques observés. Plus précisément, compte-tenu de la prédisposition des perruches ondulées à développer des tumeurs urogénitales et du « syndrome de masculinisation » observé, une tumeur sécrétante d’origine ovarienne est fortement suspectée (Fig. 2A). Pour explorer cette hypothèse, une échographie cœlomique par abord ventromédian est l’examen de choix. En utilisant cette voie, les reins apparaissent comme des structures ovoïdes en coupe transversale, enclavées dans des dépressions ventrales du synsacrum, lesquelles sont visualisées sous les traits d’un « ω » hyperéchogène. Dans notre cas, un effet de masse cranioventral au rein est visualisé, compatible avec une masse ovarienne (Fig. 2B). Une endoscopie des sacs aériens peut être réalisée en vue de la réalisation de biopsies pour une caractérisation histologique.

Figure 2 – (A – Gauche) Tumeur ovarienne chez une perruche ondulée présentant une parésie unilatérale gauche. (B – Droite) Echographie cœlomique par abord ventromédian

Quelle est votre approche thérapeutique ?

Chez les oiseaux, l’exérèse totale d’un processus néoplasique ovarien est rendue compliquée par l’existence de relations anatomiques étroites entre l’ovaire et certaines structures vasculaires majeures (notamment la veine cave caudale). Par ailleurs, aucun protocole de chimiothérapie n’a été décrit à ce jour pour la gestion des tumeurs reproductrices chez les oiseaux. En conséquence, l’approche thérapeutique lors de tumeurs ovariennes chez les oiseaux est essentiellement palliative et repose sur le contrôle de leurs conséquences :

  • Perturbations hormonales: L’utilisation d’analogues de la GnRH tels que l’acétate de leuprolide (1500-3500 µg/kg IM q15 jours) ou l’acétate de desloréline (4.7 mg SC q 4 mois), ont été décrits comme des traitements efficaces dans le contrôle des tumeurs ovariennes chez des perruches calopsittes atteintes de carcinome ovarien et chez les poules.4,5 Toutefois, la réponse peut être variable en fonction des individus.
  • Ascite néoplasique: L’accumulation de liquide d’ascite peut engendrer à la fois des difficultés respiratoires, locomotrices et digestives. Le traitement de l’ascite néoplasique chez les oiseaux repose sur l’administration de diurétiques (p.ex. furosémide 1-5 mg/kg PO q12h) associés au besoin à des cœlomocentèses périodiques. Une réduction de l’apport en sodium dans l’alimentation pourrait également être une mesure bénéfique.
  • Inconfort : L’utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (p.ex. méloxicam [1 mg/kg PO q12h]), de dérivés morphiniques (p.ex. tramadol [30 mg/kg PO q12h]) et/ou de gabapentinoïdes (p.ex. gabapentine [10-15 mg/kg PO q8-12h]) devrait être considérée lors de lésions nerveuses compressives. Parallèlement, la cage devrait être modifiée de sorte à limiter les chutes (retrait des barreaux) et à faciliter la consommation d’eau et de nourriture (installation des mangeoires et abreuvoirs au sol).

Lorsque la qualité de vie est considérée insuffisante (automutilation, inactivité, anorexie, cachexie), le recours à une euthanasie devrait être considéré. La parésie évolue généralement sur quelques semaines à quelques mois. Chez les poules, un apport complémentaire en acides gras oméga-3 ou l’utilisation d’acide acétylsalicylique dans l’alimentation de manière préventive ont été associé à une réduction significative de la sévérité des tumeurs ovariennes.6,7

RÉFÉRENCES SÉLECTIONNÉES

  1. Orosz • SE, Antinoff N. CHAPTER 9 – Clinical avian neurology and neuroanatomy. In: Speer BL, ed. Current Therapy in Avian Medicine and Surgery. W.B. Saunders; 2016:363-377.
  2. Nelson RW, Couto CG. Small Animal Internal Medicine – E-Book. Elsevier Health Sciences; 2019.
  3. Hedley J, Kubiak M. Neurologic Diseases of Birds and Reptiles. Journal of Exotic Pet Medicine. 2015;24(1):6-20.
  4. Keller KA, Beaufrère H, Brandão J, McLaughlin L, Bauer R, Tully TN, Jr. Long-term management of ovarian neoplasia in two cockatiels (Nymphicus hollandicus). J Avian Med Surg. 2013;27(1):44-52.
  5. de Matos R. Investigation of the chemopreventive effects of deslorelin in domestic chickens with high prevalence of ovarian cancer. Paper presented at: Int Conf Avian Herpetol Exot Mammal Med2013; Wiesbaden.
  6. Urick ME, Giles JR, Johnson PA. Dietary aspirin decreases the stage of ovarian cancer in the hen. Gynecologic oncology. 2009;112(1):166-170.
  7. Ansenberger K, Richards C, Zhuge Y, et al. Decreased severity of ovarian cancer and increased survival in hens fed a flaxseed-enriched diet for 1 year. Gynecologic oncology. 2010;117(2):341-347.

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